invisible hit counter

mercredi, janvier 12, 2005

Portraits de sumotori 3

HARUKI, LE YOBIDASHI
haruki
Quand Haruki eut quatre ans, sa famille émigra de Pékin, où il était né, vers Tokyo. Son grand-père paternel était japonais, et ses parents pensaient qu’ils auraient de meilleures opportunités de s’offrir une belle vie au Japon. En quelques années, ils ouvrirent un restaurant chinois dans la banlieue nord de la ville, où un ami du kashira venait manger souvent. Par l’entremise de celui-ci, ils firent la rencontre de l’oyakata, qui offrit à Haruki une place au sein de la heya dès qu’il aurait atteint l’âge minimum.

Haruki n’a jamais voulu rejoindre la heya. « Ce sont mes parents qui ont décidé », dit-il. « Je n’ai pas eu un mot à dire ». Ses parents adoraient le sumo, me dit-il, et ils voulaient qu’il devienne lutteur. Et bien qu’il ne le suggère qu’à mots couverts, ils devaient également se demander quoi faire de Haruki, dont le dégoût pour toute forme de travail scolaire devait leur causer bien du souci. « Je détestais l’école », me dit-il, « je n’ai jamais étudié ».

Mais à mesure que Haruki grandissait, ses chances de pouvoir devenir lutteur s’amenuisèrent. Sa croissance s’arrêta et son métabolisme ressemblait à celui d’une chaudière, brûlant les calories plus vite qu’il ne pouvait les consommer, le laissant sec comme un coup de trique. Il semblait encore moins fait pour le sumo que pour la vie scolaire.

L’oyakata, toutefois, était résolu à tenir sa promesse. Il avait accepté d’accueillir Haruki au sein de la heya et demeurait apparemment déterminé à le faire. « Il m’a dit, ‘si tu ne peux pas devenir lutteur, sois un yobidashi’ », se souvient Haruki. Et donc l’an dernier, au mois d’avril, après qu’il eût fini son collège, le jeune garçon rejoignit la heya pour entamer sa carrière d’annonceur du sumo.

Haruki me dit qu’il détestait le sumo quand il est entré dans la heya, mais il a appris à en aimer les membres et est simplement indifférent au sport désormais. « Je n’aime pas ça, mais c’est toujours mieux que les études ».

A l’instar des lutteurs, les yobidashi ont une hiérarchie, déterminée pour l’essentiel par leur ancienneté. Comme yobidashi novice, Haruki annonce les matches de tournoi entre les lutteurs les plus mal classés qui combattent tôt le matin. Les yobidashi jouent aussi du tambour chaque matin de tournoi quand les combats débutent, balayent le dohyo entre les combats, et déploient les bannières portant les logos de compagnies qui offrent des primes aux gagnants de certains matches.

« Ce n’est pas un travail difficile, mais c’est intimidant », me dit Haruki, « je déteste être debout devant tant de gens ».

Entre les tournois, les responsabilités d’un yobidashi se réduisent quasiment au néant. Il peut avoir à participer à la confection d’un dohyo d’entraînement ici et là, et c’est à peu près tout. Donc il se lève, assiste un peu à l’entraînement matinal, balaye l’entrée, attend le déjeuner, fait un somme, fait un peu de ménage, prend son dîner, puis lit des bédés et joue aux jeux vidéos avant d’aller se coucher. Ce qui somme toute est à peu de chose près le régime de vie des lutteurs, la lutte en moins.

APRÈS: Le Pride